Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Be the bird, Be the key
13 février 2014

Le chemin des aiguilles

La pièce est blanche et chaude. Sous la couverture je n'ai pas froid, je n'ose pas bouger de peur d'arracher les aiguilles qui parsèment mon corps.

Il m'a longuement écoutée, a rebondi, a compati. Il a compris combien j'ai eu mal, j'ai encore mal, que ce soit dans le ventre et dans la tête. Il a compris mes questions qui n'auront jamais de réponses, il a su me rassurer.

Face à moi un cierge du Pérou absorbe les ondes électromagnétiques. Dans la pièce d'à côté des voix douces, une autre vie, une autre histoire mais une souffrance certainement identique à la nôtre. Je ne me sens pas seule, je me sens bien, je sais que ce chemin est le bon, celui du pardon, de l'apaisement.

Je suis venue les dents serrées, la tête en vrac mais sûre de ne pas me laisser faire cette fois, prête à raconter mon histoire. Au fond de cette cour parisienne, une petite maison chaude, accueillante. Il m'ouvre, me présente un siège. Je suis chez moi. Pas de cheminée mais la sensation est la même qu'un feu de bois, les livres qui m'entourent me réchauffent. Sur la pointe des pieds, pour ne pas perturber ce silence ouaté, je rejoins la bibliothèque. Mon regard caresse La vie devant soi, Gros-Câlin et les best-sellers de Jack London. J'ai le cœur plein, les mots, les livres, toujours eux, toujours là. Indéfectibles compagnons.

Étendue dans cette pièce blanche et chaude, petite brochette sous la couverture, je pense à l'incroyable existence de Roman Kacew qui fut Gary, Ajar et tant d'autres. Je pense à Jean Seberg, l'amour de sa vie, à cet enfant qu'ils ont perdu, à ce ventre qu'elle a dû maudire elle aussi. Je pense à toutes ces femmes qui ont souffert, à Marilyn Monroe, à Frida Kahlo et à toutes celles qu'on ne connaît pas, qui ont saigné, qui ont eu mal, qui ont hurlé, qui n'ont pas été entendues. Je pense à cette paroi où je m'accroche depuis des mois, à cette petite force qui m'aide à tenir mais qui est si ténue. A cet espoir au fond de moi, bien caché, qui me dit qu'il faut y croire.

Mon corps se détend. La pluie tombe sur le toit vitré de la petite maison, je ferme les yeux, ma respiration se cale sur la douce caresse des gouttes sur les carreaux. Il revient, retire quelques aiguilles, en remet d'autres. Ses conseils fusent, désordonnés, je capte ce que je peux, absorbe au maximum, sûre de revenir très vite.

Dehors il fait nuit, je laisse la pluie m'inonder jusqu'au métro, le froid m'attaquer. Mon ventre est heureux, je le caresse d'une main chaude. Il est vide mais il se répare, se reconstruit, se prépare aux prochaines attaques. Nous serons plus forts cette fois, plus sereins.

Publicité
Publicité
Commentaires
L
Je ne pourrais dire mieux. Ton message m'a également apaisée. Merci de l'avoir écrit, et de la sorte.
B
Je découvre ton blog sur ce texte si fort. Fort au point que j'ai décroché quelques larmes et enfin composé le tel de la thérapeute qui m'a fait du bien. J'espère que ces séances te reconstruisent, toi, ta tête et ton ventre. Des bisous et des mercis d'avoir narré de cette si jolie façon l'une des séances de ta (sur)(re)vie
Be the bird, Be the key
Publicité
Archives
Publicité